Yann : 2049

Paris,
le 10 avril 2049.

Xin chào Yann,

C’est moi, Yann, 50 ans plus tard.

Je sais que ça doit te faire un drôle d’effet de lire une lettre de ton futur toi. Pourtant, me voilà, assis dans un coin de l'Asie, là où tout a commencé pour nous. Ça doit te surprendre de te lire ainsi, n'est-ce pas ? C’est comme si j’avais pris une machine à voyager dans le temps pour te raconter ce que j’ai découvert en chemin. Alors installe-toi bien, et laisse-moi te parler de tout ce que tu as traversé – et surtout, de tout ce que tu es devenu.

Aujourd’hui, je suis apaisé, en paix avec moi-même et avec ce monde qui, autrefois, me semblait si imprévisible et parfois cruel. La douleur du décès de Marco n’a jamais vraiment disparu, tu sais. Mais avec le temps, elle a changé de forme. Elle est devenue un souvenir doux-amer, une source de force plutôt que de désespoir. Quitter la France pour l’Asie a été la décision la plus courageuse que tu pouvais prendre à ce moment-là, même si tu ne savais pas exactement où cela te mènerait.

Ces premiers mois, je me souviens, ont été un vrai tourbillon. Tu te sentais perdu, déraciné, face à toi-même dans un pays lointain. Mais tu as tenu bon. Tu t’es donné le temps, l’espace pour respirer, pour explorer sans pression. Et puis, peu à peu, quelque chose de beau a émergé de ce vide. Les rencontres, les expériences, l’apprentissage d’une nouvelle culture… Tout cela t’a offert une perspective nouvelle. Lentement, presque sans que tu t’en rendes compte, tu as commencé à te reconstruire, à trouver un nouveau sens à ta vie.

Aujourd'hui, je vis une vie plus simple, plus alignée avec mes valeurs. L’authenticité et la liberté que tu chéris tant sont devenues mes compagnons de route au quotidien. J’ai découvert une passion pour l’enseignement et le partage, quelque chose que tu n’aurais jamais imaginé dans ta vie d’avant. Oui, tu as fini par trouver une nouvelle voie professionnelle, mais bien différente de celle que tu avais dans le passé. Ici, je suis respecté pour ma capacité à aider les autres à comprendre leur propre chemin, un peu comme tu as appris à comprendre le tien.

Je sais que tu te demandes si quitter la France était la bonne décision. La réponse est un grand "oui". C’était la seule décision possible pour toi à ce moment-là, parce qu’elle t’a permis de te retrouver. Tu n’as pas seulement fui quelque chose, tu es allé vers quelque chose de bien plus grand : toi-même. Cette expérience en Asie t’a offert l’opportunité de lâcher prise sur le besoin de tout contrôler, et d’apprendre à vivre dans le présent. Et c’est là que tu as trouvé ta paix intérieure.

Aujourd’hui, je suis entouré d’amitiés sincères, celles que j’ai construites ici, des relations basées sur le respect et la profondeur, bien loin des réseaux superficiels du passé. Et puis, il y a l’amour. Oui, tu l’as trouvé. Ce n’était pas une priorité pour toi à l’époque, mais la vie t’a réservé cette surprise. Un jour, sans que tu t’y attendes, tu as rencontré quelqu’un qui a su faire renaître en toi la capacité à aimer, à partager de nouveau. Je n’en dis pas plus, je veux te laisser la surprise.

Je sais que tu as peur, en ce moment. Peur que le déménagement ne suffise pas à guérir tes blessures. Mais je veux te dire une chose : le chagrin ne s’efface pas comme par magie. Ce que tu vis, c’est un processus. Le chemin est parfois long, mais tu es déjà en route. Et je te promets que, même si ça ne se fait pas du jour au lendemain, tu arriveras à transformer cette douleur en quelque chose de précieux, en quelque chose qui te guidera vers une vie pleine de sens.

Alors, sois fier de toi, Yann. Fier d’avoir eu le courage de tout quitter pour te retrouver. Aujourd’hui, je te regarde avec une immense reconnaissance. Parce que c’est toi, avec tes doutes, tes peurs et ton chagrin, qui m’as permis de devenir l’homme serein et accompli que je suis aujourd’hui.

Continue d’avancer. Je suis ici, à 50 ans, et je peux te dire que le chemin en vaut vraiment la peine.

À très bientôt,
Ton futur toi, Yann

Ps : Tu es à présent trilingue, et ça ne n’est pas rien !

 
Précédent
Précédent

Zoé : 2056

Suivant
Suivant

Margaux : 2037